Philosophie
La religion
Voilà une notion qui intéresse vivement les élèves, et qui suscite débat et questionnement. Une réflexion sur la religion est l'occasion pour votre enfant de mettre en œuvre une écoute tolérante et une discussion argumentée.
La notion de religion
Qu'est-ce qu'une religion ?
Un premier temps de la réflexion invite les élèves à se demander pourquoi la philosophie s'intéresse à la religion.
En effet, celle-ci, en tant que phénomène social, culturel et historique, apparaît comme objet d'étude privilégié des sciences humaines (anthropologie, sociologie des religions, histoire). En s'appuyant donc sur les données de celles-ci, le discours philosophique peut-il apporter un éclairage particulier sur la religion ?
L'approche de la religion par l'anthropologie permet de mettre en valeur le sentiment du sacré comme fondement de toute croyance de type religieuse :
L'homo religiosus croit toujours qu'il existe une réalité absolue qui transcende ce monde -ci mais qui pourtant s'y manifeste.
Mircea Eliade
Ce propos de Mircea Eliade dans le Profane et le sacré (1957) contient un élément essentiel à la compréhension du phénomène religieux : l'adhésion à l'idée d'une réalité supra-naturelle, transcendante et dont il faut pourtant chercher à interpréter les signes, les traces dans le monde profane. C'est donc la distinction entre le sacré et le profane qui est au cœur de l'attitude religieuse.
Ce sentiment du sacré ne suffit sans doute pas à lui seul à constituer une religion – on peut alors parler de religiosité - mais il en constitue néanmoins une dimension fondatrice. Selon une formule célèbre de Cicéron :
La religion est le fait de se soucier d'une certaine nature supérieure et de lui rendre un culte.
De la nature des dieux
Cette formule permet de mettre en lumière les deux éléments essentiels constitutifs d'une religion :
- la reconnaissance d'une réalité supérieure (sentiment du sacré)
- l'attitude religieuse qui découle de cette croyance, et qui s'exprime par le culte (rites, prières, attitudes et comportements religieux).
Le songe de Jacob, Chagall, 1956
Par ailleurs, de nombreux anthropologues et philosophes énoncent l'idée que la religion est un phénomène universel, présent dans toutes les civilisations humaines.
Comme le souligne Bergson, « il n'y a jamais eu de société sans religion » (Les deux sources de la morale et de la religion).
Ainsi, la religion n'est pas l'affaire d'un seul individu qui serait rattaché de manière verticale à un ou des dieux ; elle a une dimension horizontale en ce sens qu'elle relie les hommes entre eux de manière particulière.
Le lien entre religion et société est donc étroit, ce que semble confirmer une approche sociologique de la religion. C'est à ce titre que Durkheim, dans une analyse célèbre de la religion (voir le texte plus bas) affirme que la religion est « inséparable de l'idée d'église, c'est-à-dire de communauté ». Durkheim fait de celle-ci un « fait social ».
Ainsi, une première approche permet de montrer aux élèves que la religion peut être appréhendée sur deux plans :
- celui d'une réalité éminemment collective
La religion serait d'essence clanique, elle ne peut être que le résultat d'une croyance et d'une pratique (rites/rituels) partagées par plusieurs individus, croyance qui pourrait être envisagée, comme le pense Durkheim, comme l'expression du sentiment d'appartenance à un groupe en même temps que le lien qui permet à ce groupe de rester solidaire, unifié en une totalité « autour de pratiques et de croyances communes relatives à des choses sacrées ». (Durkheim). A ce titre, la religion est sans doute un des traits les plus distinctifs de ce qu'on appelle la culture.
- celui de la croyance personnelle dont on pourra discuter du fait qu'elle puisse être librement choisie et qu'elle puisse représenter une démarche personnelle.
En effet, si la religion s'exprime extérieurement comme phénomène collectif, en ce sens qu'elle a toujours une visibilité plus ou moins forte dans une société, elle peut aussi être appréhendée d'un point de vue individuel sous le rapport d'une croyance subjective, propre à un individu. Elle appartient alors à la catégorie de la foi, et l'on peut proposer aux élèves de partir de la définition que Kant donne de la « foi » :
« une croyance subjectivement suffisante et objectivement insuffisante ». (Critique de la Raison Pure)
Cette définition a le mérite de ne pas restreindre la notion de foi à la seule foi religieuse : ainsi, je peux avoir foi en l'humanité, foi en un idéal de justice, etc.
Quelle serait donc l'originalité de la foi en matière de religion ?
La croyance religieuse exclut-elle l'usage de la raison ?
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