Interviews
L'élève au coeur de sa réussite
Suite à la parution de son livre, L’élève au cœur de sa réussite, des plus roboratifs, nous avons interviewé Marie-Hélène Fasquel, une enseignante pleine d’énergie qui a reçu de nombreux prix internationaux.
Ce livre est destiné à tous ceux qui souhaitent comprendre l’école et se soucient de l’avenir de nos enfants. A mettre entre toutes les mains !
Ne tirez pas sur l'Ecole de la République ... Cela aurait pu être l'autre titre de cette autobiographie. Parce qu'il s'agit pour Marie tout autant de faire entendre la voix des profs motivés comme elle, que de mettre en valeur tous les efforts de ses élèves. Mais si c'est l'élève qui a été retenu, c'est bien parce que c'est lui, avant tout, qui est au coeur de tout son travail.
Marie-Hélène Fasquel est une prof détonnante: eTwinning, blog, padlet, concours, podcasting, soap opera, classe inversée... tous ces outils (numériques ou non) sont au service de la réussite de ses élèves et de son plaisir communicatif d'enseigner.
Une enseignante qui casse les murs de la classe pour communiquer et mettre en lien ses élèves et le monde.
Bonjour Marie. Vous êtes une enseignante qui n'enseigne pas de manière classique. Pourquoi ?
J'ai essayé pendant une semaine au début de ma carrière. Mais je me suis dit que ça n'allait pas être possible! Mes élèves n'étaient pas aussi enthousiastes que moi...
L'ennui, c'est la mort de l'enseignement !
Alors il faut que je trouve des facteurs de motivation. Je me re-forme, je découvre la pédagogie de projet... Pour les intéresser, rendre le cours vivant et me sentir vivante ! Je vais de plus en plus loin, je les ouvre sur l'international...
Alors, aujourd'hui pour motiver les élèves, je m'appuie sur 4 points en particulier qui expliquent mon travail :
- le numérique
- l'ouverture sur le monde et l'international
- le développement de l'autonomie
- les concours en ligne pour les valoriser
Comment conciliez-vous programmes et projets ?
Je travaille avec mes élèves de lycée sur 3 ans: de la 2nde à la Terminale. Il est vrai que je fais peut-être davantage de projets en 2nde mais je continue jusqu'à la terminale.
Les programmes imposent l'étude de 13 oeuvres, qui allient classiques et modernes, auteurs morts et contemporains. Alors je peux travailler avec des auteurs vivants et qui acceptent de travailler avec mes élèves, par Skype par exemple...
Le projet permet d'approfondir une oeuvre, de la découvrir autrement, de faire appel à la créativité des élèves, à leur imagination. Cela motive tous les élèves en leur permettant de travailler à leur rythme et selon leur talent. Ils travaillent donc différemment lors des projets.
Les exemples sont nombreux dans le livre, mais pouvez-vous nous en donner un autre ici ?
Oui, le projet Tacoma !
Nous allons travailler avec une classe de Tacoma (et son enseignante de littérature américaine). Nous allons analyser La Tempête de Shakespeare en collaboration et en échangeant à travers un blog. Ils vont écrire de la poésie, discuter de leur travail, échanger grâce à Google Doc. Ils vont mettre en scène des passages, les filmer et les mettre en ligne sur Youtube. Ils vont écrire des critiques de leurs travaux mutuels. Ils vont produire un Podcast sur La Tempête....
Et ça marche ! Nos élèves ont eu d'excellentes notes au bac l'année dernière !
Vous inscrivez vos classes et vos élèves à de nombreux concours. Pourquoi ce choix ?
Tout a commencé avec une classe de 2nde il y a quelques années.
Nous voulions mener avec un projet autour de l'environnement et leur faire écrire des nouvelles. Mais comment les faire écrire ? Comment les motiver ?
A l'époque, j'ai cru que si je lançais un concours entre eux (avec remise de cadeau et de lettre d'excellence), cela les stimulerait. Cela a marché.. un temps. Mais ils ont vraiment adhéré au projet lorsque nous l'avons mis en ligne. C'est devenu important pour eux alors de produire quelque chose de Beau, de donner le meilleur d'eux-mêmes.
Et les élèves de cette classe qui n'aimaient pas l'école en début d'année ont terminé en adorant les maths et l'anglais (les deux professeurs impliqués).
De là est né la logique du concours...
Est-ce que votre pratique fait boule de neige autour de vous ? *
Dans le lycée où je suis il se passe déjà plein de choses mais petit à petit oui.. Des collègues viennent m'observer en classe, j'ai fait des formations autour du e-twinning.... Et puis de nombreux enseignants en sont déjà là aussi.
Il faut donner surtout beaucoup de liberté aux enseignants, leur permettre d'être créatif, de faire preuve d'initiatives. C'est ça la clef.
Et pour vous aussi ?
Oui ! J'ai besoin de changer, d'évoluer, que ça bouge !
Quelle importance accordez-vous à l'affect ?
Les neurosciences disent que l'on apprend mieux lorsque nos émotions et nos sensations sont touchées et mobilisées. S'il n'y a pas d'affect, les élèves n'ont pas envie de travailler. Lorsque votre enfant vous dit "je n'aime pas le prof", on sait, en tant que parents, que l'année va être longue et que son enfant ne travaillera pas vraiment la matière.
Mais c'est aussi ce que je suis naturellement. On est dans la classe comme on est dans la vraie vie.
Il est très important que mes élèves et moi nous soyons heureux ensemble au moment précis du cours.
Merci Marie !
L'élève au coeur de sa réussite est un ouvrage à lire d'urgence, c'est une dose massive d'énergie que nous offre son auteur. L'aventure d'une aventurière de la pédagogie.
Marie-Hélène Fasquel, professeure agrégée d'anglais, enseigne la littérature américaine en section internationale au Lycée Nelson Mandela de Nantes. Ambassadrice eTwinning, Microsoft Expert Educator, elle est la seule Française à avoir été retenue parmi plus de 22 000 candidatures au Global Teacher Prize 2017.
Retrouvez aussi Marie sur la page Facebook du livre et sur son Blog Sharing & Teaching et pour l'écouter encore un peu :
* Parce que nous avons tous envie que nos enfants aient une prof comme Marie, la question s'imposait ;-)